Sorti en 2022, Alerte Rouge est un dessin animé du studio PIXAR qui a reçu un très bon accueil critique et public. Cependant, si personne n’en parle aujourd’hui, c’est aussi parce que peu de spectateurs l’ont vu… pourquoi ?
Avant de réaliser (le très réussi) Elio, Domee Shi avait réalisé un court-métrage Bao et un long Alerte Rouge. La jeune réalisatrice sino-canadienne injecte alors une grande part d’elle-même dans ses premières œuvres : en plaçant son récit à Toronto, dans une famille chinoise notamment.
Mais plus qu’un récit autobiographique, Alerte rouge est surtout un film qui aborde des thématiques nouvelles pour le studio. Si l’on peut avoir l’habitude de voir des dessins animés traiter du passage de l’enfance à l’adolescence ou à l’âge adulte, il est plus rare de voir un film traiter les menstruations aussi frontalement.
Malheureusement, lorsque l’on pense à des films PIXAR : Alerte Rouge n’est pas un des premiers cités malgré de grandes qualités… pourquoi ?
Une énergie débordante
Il est impossible de ne pas mentionner le rythme d’Alerte Rouge. Grâce à son montage ultradynamique et à l’animation de ses personnages, le film conserve une énergie folle tout au long de ses 99 minutes.
En effet, si KPop Demon Hunter a percé grâce aux mimiques de ses personnages, force est de constater qu’Alerte Rouge en est le pionnier. Que ce soit dans la dynamique de groupe des 4 jeunes filles, le tempérament d’Abby ou l’omniprésence de boys bands : les ressemblances sont si frappantes qu’il est difficile d’imaginer que ce PIXAR n’ait pas été une source d’inspiration pour Maggie Kang et Chris Appelhans (réalisateurs de KPop Demon Hunter).
La bande originale est d’ailleurs d’une grande qualité ! Signées par Ludwig Göransson (Tenet, Sinners, Oppenheimer) et Billie Eilish (rien que ça), les musiques des boys bands sont particulièrement marquantes et resteront en tête bien après le film.
Par ailleurs, le rythme effréné permet aussi de marquer et de souligner quelques rares temps de pause durant lesquels Domee Shi développe ses personnages (souvent la relation mère/fille).
Un scénario original
Comme de nombreux PIXAR, Alerte Rouge aborde des sujets touchant à la fois les enfants et les adultes, ici : les menstruations. En effet, la jeune Meilin découvre un jour qu’elle se transforme en panda roux et que sa couleur de cheveux change du noir au roux à ce moment-là… Cette transformation et les discours que lui tiennent ses parents ne sont pas anodins et permettent d’aborder en douceur une thématique trop peu représentée sur grand écran.
Mais l’originalité du scénario ne s’arrête pas là. La place qu’occupe le panda roux est également une particularité dans Alerte Rouge. Dans la plupart des films, lorsqu’un personnage se transforme en quelque chose, il tente de le cacher, alors qu’ici non (ou très peu). En effet, Meilin est rapidement découverte par ses amies et la double identité de Meilin ne sera jamais un enjeu durant le récit.
L’acceptation de ses amies joue aussi un rôle très important dans le sous-texte du film, car si on file la métaphore du panda roux qui représente les règles : Meilin n’est pas rejetée par ses amies lorsque la puberté arrive et cela participe à banaliser/normaliser cet événement pour éviter de créer des complexes.
Un film abandonné par Disney
2020 a été une année charnière dans l’histoire de Disney. L’arrivée du covid a permis au studio de justifier un plan qu’il avait depuis longtemps : la dématérialisation de tout et l’abandon des cinémas. En effet, pour Disney la diffusion d’un film est « couteuse » dans le sens où il ne retire pas tous les bénéfices des ventes de billets.
Entre les exploitants de salles et les organismes locaux (comme le CNC en France) : le producteur/distributeur qu’est Disney ne récupère qu’un pourcentage du billet. L’avantage de Disney+ est alors que tous les abonnements vont directement sur les comptes de Mickey : moins d’intermédiaires, plus de cash ! Mais ça, c’est la théorie. Dans la pratique, un abonnement au mois rapporte moins qu’un achat de ticket pour un film et il faut pouvoir conserver les abonnés avec du contenu fréquent. C’est pourquoi pour appliquer cette stratégie, le studio n’allait pas la tester sur ses propres films et c’est là qu’entre en scène PIXAR.
Le studio appartenant à Disney depuis 2006 a largement été sacrifié pour tester cette méthode : Soul, Luca et Alerte rouge ont tous été balancés sur Disney+ comme du contenu à bingewatcher et n’ont pas profité d’une véritable sortie en salle… La conséquence est que sans une vraie sortie en famille, ces films ont été vus à la télé d’un œil peu attentif et oubliés dans la foulée.
Aujourd’hui, le studio est revenu de cette stratégie peu payante et recommence à sortir les films Pixar au cinéma, mais trop tard pour Alerte Rouge qui a clairement été sacrifiée par Disney.
Alerte rouge est un excellent film PIXAR qui aborde des sujets rarement mis en avant, tout en gardant un rythme et une énergie débordante. C’est un véritable « feel good movie » qui n’a juste pas bénéficié de la mise en avant qu’il aurait méritée.
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