LA CRÉATURE PLUS HUMAINE QUE L’HOMME

Pauvres Créatures marque le retour de Yorgos Lanthimos, cinq ans après son excellent The Favorite avec Emma Stone. C’est donc avec cette dernière que le réalisateur grec va nous immerger dans son univers aussi bizarre que poétique. Pour ce faire, il va se servir d’une esthétique fantastique, que ce soit à travers les ciels colorés, l’architecture ou même la forme de son bateau de croisière. Nous allons naviguer à travers cette direction artistique imaginaire qui sera en réalité l’instrument d’un récit à l’atmosphère étrange et froide, appuyée par ces cadres captés au grand-angle et/ou avec un effet fisheye qu’on a déjà eu l’occasion de voir précédemment dans la filmographie du cinéaste. Hormis la mise en scène virtuose, la prestation des acteurs est époustouflante, que ce soient les seconds rôles Mark Ruffalo ainsi que Willem Dafoe, mais surtout avec la performance grandiose d’Emma Stone.

La fin du film nous laisse interrogateurs de ce que nous avons vu. C’est comme prendre un tsunami, sauf que vous remplacez l’eau par une richesse abondante d’images, d’interprétation de messages accentués par le développement de personnages fantastiques dans une enveloppe humanisée. En effet, le message central, selon moi, qui sera sans doute différent pour d’autres, ne relève pas de l’originalité en montrant que l’Homme est mauvais. Cependant, ce sera dans sa manière d’être représenté que ce sujet deviendra intéressant. Tout comme pour La planète des singes – Suprématie, nous allons nous rendre compte que l’animal devient plus humain que l’Homme et que ce dernier deviendra une bête sauvage. Dans Pauvres Créatures, les personnages de Mark Ruffalo et de Christopher Abbott incarnent l’Humain, mais surtout la masculinité dans son côté le plus sombre et le plus toxique, révélant une nature monstrueuse. Ce seront donc bien les créatures incarnées par Willem Dafoe et Emma Stone qui auront à l’inverse et avec ironie, une attache beaucoup plus humaine.

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DÉCOUVRIR PAR LA SEXUALITÉ

Le développement d’Emma Stone sera également habile et percutant, car parallèlement au message que la créature est plus humaine que l’Homme, nous aurons l’apprentissage de la vie de Bella (Emma Stone) découvrant le monde extérieur. L’art et la littérature, mais surtout l’axe majeur d’apprentissage qui est la sexualité. En effet, l’originalité réside dans cette manière de permettre à Emma Stone de découvrir le monde. La sexualité lui permettra de se découvrir elle-même, de découvrir la passion via son amant, la toxicité de la passion de l’homme via ce dernier à nouveau, ou à travers son mari d’antan. L’expérience de découvrir d’autres aventures, qu’elles soient réussies ou non, d’aller plus loin que le sexe entre un homme et une femme ou tout simplement une relation peu charnelle mais plus traditionnelle avec son compagnon. Toutes ces aventures nous permettront de vivre les expériences de Bella et de suivre le développement de cette créature fortement humanisée à travers la sexualité.

Pauvres Créatures dérange autant qu’il émerveille, mais tout ça aura une fonction majeure de nous faire voyager à travers l’humanité dans sa noirceur ainsi que dans sa lumière entre imaginaire et réalité.