
Sorte de reboot du film (presque) éponyme de celui réalisé par David Ayer en 2016, The Suicide Squad de James Gunn (2021) fait bien mieux que son prédécesseur, en livrant un divertissement enthousiasmant, fun et coloré.
Dans un paysage cinématographique hollywoodien boosté aux films de super-héros, parsemé ici et là de quelques reboots aux intentions douteuses, le film Suicide Squad (2016) de David Ayer pouvait ressembler à un petit vent de fraîcheur, en mettant en scène des anti-héros, à contre-courant de ce qui pouvait se faire à l’époque. Mais le long-métrage du réalisateur de Fury (2014) s’est finalement avéré être un pétard mouillé après avoir traversé un développement chaotique.
Critiques incendiaires, performances fades (seule Margot Robbie s’en donne à cœur joie en Harley Quinn), montage charcuté donnant lieu à un film hybride : malgré un succès convaincant au box-office (749 millions de dollars de recettes mondiales pour un budget de 175 millions), ce Suicide Squad est un ratage total et plonge encore plus la Warner dans le doute, sa volonté de rattraper Marvel pour construire un univers connecté prenant du plomb dans l’aile.
Si une suite avait été annoncée par Warner Bros. avant même la sortie du film, le mal était déjà fait. James Gunn reprend les rênes fin 2018, rajoute le « The » devant le titre, garde certains personnages et en laisse d’autres de côté. Mi-suite, mi-reboot, l’intérêt de cette nouvelle ébauche laissait à désirer, surtout après le crédit dilapidé sur le précédent long-métrage. Mais désormais, chez la Warner, la volonté est aux changements : laisser les pleins pouvoirs aux réalisateurs et aux réalisatrices, sans besoin excessif de tout relier. Au vu du résultat, c’était probablement la meilleure chose à faire.
Un déluge baroque, gore et psychédélique
Les pleins pouvoirs pour James Gunn, et ça se voit : déjà auteur d’une trilogie vraiment sympa et divertissante du côté de Marvel avec Les Gardiens de la Galaxie, le réalisateur américain se sert de son nouveau joujou comme un défouloir, laissant exulter son style exubérant avec une générosité et un amour fous.
Geysers de sang – James Gunn se laisse aller à la violence la plus gore et crade à l’écran, en témoigne l’interdiction aux moins de 16 ans à la sorite du film -, compositions colorées psychédéliques, formes tout droit sorties d’un comic-book ; plastiquement parlant, le film ressemble à une gigantesque expérience sensorielle, pleine de couleurs vibrantes, un mélange viscéral et poétique donnant lieu à une proposition baroque. Le réalisateur s’amuse à jouer avec les codes, à détruire les bases du précédent long-métrage pour mieux reconstruire dans une séquence d’introduction aussi tragico-comique que marquante.
A des années-lumières de son très fade, inconsistant et même ridicule prédécesseur, The Suicide Squad est sanglant, explosif, boulimique dans sa façon d’exposer la violence à l’écran. Mais c’est là toute la force du message de James Gunn : tout au long du film, et grâce à un climax dantesque, il tourne en dérision la mort dans une explosion de violence cartoonesque qui ne trouve jamais de fin, de manière à mieux exposer les dérives de l’espionnage et de la guerre.
Des anti-héros nihilistes, mais tellement attachants
Ce que le film réussit également infiniment mieux que le long-métrage de David Ayer, ce sont ses personnages, au cœur de son récit. Là où seuls Margot Robbie (Harley Quinn) et Will Smith (Deadshot) voyaient leurs protagonistes un tant soit peu développés, les autres étant réduits à de la figuration, chez James Gunn, chacun peut trouver la lumière (ce qui fait la force de son cinéma), même les plus dysfonctionnels, les plus ridicules, les plus horribles ou les plus insignifiants.
Sur un terrain de jeu propice aux caractères les plus extravagants, James Gunn se plaît à exploiter chaque faille de ses personnages, à les pousser au plus près du précipice pour mieux les relever. Ceux que l’on imaginait pas sur le devant de la scène finissent par rayonner, et chacun possède son moment de bravoure.
Finalement, en plus d’être un film à la fois violent et poétique, gore et fun, The Suicide Squad est avant tout un film sur des personnages tous plus touchés les uns que les autres, qui cherchent à sortir de leur quotidien moribond : un film sur la rédemption. James Gunn signe ici son meilleur film, le plus violent mais également le plus attachant.
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