
Sorti en 2004, Les Indestructibles, réalisé par l’excellent Brad Bird, auteur notamment de Ratatouille (2007), Mission Impossible : Protocole Fantôme (2011), ou encore du très mésestimé Tomorrowland (2015), met en avant une famille de superhéros contrainte de s’intégrer à la vie normale et de renier leur véritable nature. Sixième film des studios d’animation Pixar, le long-métrage s’impose sans peine comme l’un des classiques de la firme.
Auteur de cinq films pour Disney/Pixar, Brad Bird est très attaché aux thématiques de l’enfance et de l’imaginaire. Dans Les Indestructibles, le cinéaste américain s’attaque cette fois à un couple marié et à ses deux enfants (plus un troisième en bas âge), tous dotés de pouvoirs surnaturels : M. Indestructible, doté d’une force surhumaine, Elastigirl et sa capacité à étirer/comprimer son corps, Flèche qui court aussi vite que Flash et Violette qui peut se rendre invisible et projeter des champs de force. Cela rappelle bien évidemment Les 4 Fantastiques, famille de superhéros du voisin Marvel.
Être ou ne pas être
Autrefois au summum de sa notoriété, M. Indestructible vit très mal le fait de devoir rentrer dans le rang, quand sa banale réalité actuelle entre en contradiction avec sa grandeur passée. Robert « Bob » Parr (de son vrai nom) vit désormais une existence recluse, loin du feu des projecteurs, tout en essayant de prendre soin de sa famille qui subit le même sort. Plus qu’un simple film de superhéros, le long-métrage est une véritable introspection sur le fait d’exprimer ou non sa véritable nature quand le monde entier, qui craint la différence, tente de l’étouffer.
Progressiste dans les sujets qu’il aborde, le film est même carrément féministe en faisant d’Elastigirl le ciment de cette famille pas comme les autres, un personnage puissant et vulnérable à la fois, pendant que le père de famille rumine sur son existence morose. Les tensions entre elle et son mari sur le fait de laisser libre cours à ses talents et de ne pas renier ses différences irriguent tout le récit d’un fil conducteur puissant, vecteur d’une sensibilité et d’une intensité fortes, et d’une véritable quête de sens qui anime les personnages.

Le film questionne donc en filigrane le sujet de la différence dans une société toujours plus conformiste, qui demande aux superhéros de garder leurs identités secrètes et de se fondre dans la masse. Brad Bird met face à face « exceptionnel » et « normalité » comme dans un véritable combat entre superhéros et antagoniste, comme si la normalité, finalement, était le véritable ennemi.
Une technique maîtrisée et un dynamisme dantesque
L’autre force du film d’animation repose dans sa direction artistique. Ces puissantes thématiques sont magnifiées par la maîtrise technique de Brad Bird, utilisant l’animation comme un véritable terrain de jeu et s’adonnant à tous les champs des possibles. Le réalisateur américain délivre un véritable travail d’orfèvre en proposant un mélange de virtuosité et d’intensité. Son montage est ultradynamique, mais l’action n’est jamais brouillonne, et toujours lisible. C’est d’ailleurs à travers les scènes d’action que le style du metteur en scène s’exprime le plus efficacement ; le film est découpé et ciselé avec une fluidité impressionnante, mettant en scène les pouvoirs de chacun dans une parfaite synergie.
Le long-métrage atteint son apothéose avec la cultissime séquence de l’avion ciblé par des missiles, séquence qui touche au sublime en termes de découpage technique, d’intensité et de montage visuel et sonore (le film a d’ailleurs remporté l’Oscar du meilleur montage sonore en 2005, en plus de l’Oscar du meilleur film d’animation la même année), un véritable mélange d’émotions qui submerge le spectateur et qui met en œuvre en quelques secondes toute la palette du réalisateur.
Brad Bird signe, avec Les Indestructibles, l’un des longs-métrages d’animation les plus marquants de son époque, qui résiste parfaitement à l’épreuve du temps. Sous ses airs de divertissement enfantin, le long-métrage de Pixar est extrêmement profond, en interrogeant intelligemment la thématique de l’identité superhéroïque. Thématiquement fort, le film l’est aussi par sa technique et son montage qui frôlent la perfection. Plus de vingt ans après, le film n’a rien perdu de sa force et de son impact.




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