
Peter Jackson, bien avant Seigneur des Anneaux et King Kong, avait réalisé Braindead. Ce film l’a rendu célèbre auprès de toute la communauté gore. C’est surement grâce à Braindead que sa carrière a décollé. Même si ce film est le troisième dans la filmographie de l’auteur (après Bad Taste et Meet the Feebles), il est considéré comme son premier « vrai » film.
Avec Braindead, c’est la première fois que Peter travaille sur un script bâti en avance. Ses deux précédents films ressemblent plus à une succession de sketches. C’est aussi la première fois qu’il réalise un film avec un budget. Bad Taste avait été réalisé sans moyens, sur ses fonds propres en récupérant des chutes de pellicule Super 16 dans le laboratoire où Jackson travaillait pour financer sa vie et son film. Il avait fallu 7 ans au réalisateur du Hobbit pour terminer le tournage de son premier film. Son œuvre suivante, Meet the Feebles, une parodie violente du Muppet Show, avait été réalisée aussi sans budget, avec beaucoup de bénévolat, en attendant des fonds pour son projet de film King Kong. Il n’a pas les fonds cette année-là pour le remake de son film préféré. Par contre Meet the Feebles reçut un prix et connut un beau succès en Nouvelle-Zélande. Ce film permet à Jackson de mettre en place son premier projet professionnel : une comédie gore.
Doté d’un petit budget, Braindead a pu bénéficier d’un scénario. Il marque un tournant dans la filmographie de l’auteur, quittant les récits à sketch pour une œuvre narrative, brassant des thèmes importants comme la domination maternelle et familiale, l’immigration et le pillage des peuples premiers par les Occidentaux.
Qu’est-ce que Braindead ?
Braindead, c’est l’histoire d’un fils à maman qui tombe amoureux d’une étrangère hispanophone. La mère du jeune homme, une vieille peau raciste et acariâtre s’oppose à ce mariage. Pendant ce temps, des aventuriers ont réussi à faire sortir d’une île une espèce animale inconnue : le rat-singe. Cet animal dangereux transmet un virus par morsure, transformant les gens en morts-vivants. Lors d’une visite au zoo, l’animal ne manque pas de mordre la mère du héros, déclenchant l’épidémie.
Braindead, c’est un film d’horreur. Il en possède tous les codes : lumière, scénario, jump scare, mise à mort sanglante et douloureuse, survivalisme. Le parcours du héros s’affirme au travers des épreuves en triomphant du mal. C’est un film de zombies dans un huis clos, quasiment toute l’action ne se passant que dans une maison, celle de la grand-mère du réalisateur. Le film nous retourne les tripes dans tous les sens. Mais ce qui fait la réputation de ce film d’horreur n’est pas son niveau de terreur, c’est le gore. Peter Jackson ne l’a jamais caché, pour lui, le film qui inspire son cinéma est Evil Dead de Sam Raimi. L’effluve de violence, le low budget, l’atmosphère poisseuse, le côté second degré, tout cela se retrouve dans ces films. Jackson, en fanatique du maquillage, du latex, laisse libre cours à son imagination horrifique. Il a appris à maitriser ce savoir-faire en autodidacte. Ses deux premiers films en témoignent. Là, il pousse son art au plus haut niveau. Chaque scène est le moyen de se faire plaisir. Réalisateur aimant l’excès, un peu « too much ».
Braindead est certainement le film où Jackson a été le moins censuré, où il est allé le plus loin dans cette direction : montrer des tripes. Braindead est la définition du gore. Si vous voulez expliquer à quelqu’un qu’est-ce que le gore au cinéma, montrez-lui Braindead. Ce sous-genre de film d’horreur se démarque par sa profusion d’hémoglobine, de boyaux, de cervelles. Dans le gore, il n’y a pas de hors-champ, tout est visible. Dans le gore, la souffrance est surjouée, voire bannie du jeu des acteurs. Braindead nous montre des tripes, des os, des reins, des cœurs sans jamais une interruption. L’hémoglobine coule à flot jusqu’à être banalisée par notre propre regard. Les idées de mise à mort des zombies, toutes différentes, se mettent à nous faire rire. Empalons un zombie dans une lampe, il servira d’éclairage, puis au bout d’un moment prendra feu. Faisons une scène de repas avec les zombies qui coupe l’appétit. Faisons un bébé zombie indestructible et super cruel qui finit dans un mixeur. La mise en scène de Peter Jackson jouit d’excès d’hémoglobine.
Tout ce sang emmène le film vers le burlesque. Le gore amuse. Peter Jackson, en bon réalisateur, avait conscience de ça dans sa mise en scène. Les moments de bravoure se rapprochent de Tex Avery et le film est un hommage au burlesque des années 1920. Le héros tente de traverser la pièce en faisant une liane avec des boyaux et se retrouve suspendu au milieu des zombies. Le sang coule tellement à flot que les gens glissent dessus, font du surplace, comme sur un parquet ciré ou une piste de patinage. Enfin, l’arme par laquelle la menace sera endiguée est rentrée au panthéon des meilleures armes contre les zombies, même si on ne l’a jamais revue dans un autre film après : la tondeuse à gazon. Cette scène de tondeuse est d’ailleurs aujourd’hui encore considérée comme la scène où le plus d’hémoglobine a été versée. Certains sceptiques diront que Piranha 3D d’Alexandre Aja a
dépassé cette limite. Peut-être, mais le rendu de Peter Jackson fonctionne bien mieux.
De toute cette violence, de tout ce sang et grâce à son humour, le film gagna le Grand Prix à Avoriaz cette année-là. Il propulsa la carrière de Jackson en lui donnant la réputation du réalisateur de tous les défis. C’est en partie grâce à cette réputation qu’il a pu réaliser Le Seigneur des Anneaux. Dans sa trilogie culte, on retrouve ces moments de violence : des têtes volent, un énorme couteau est planté dans la jambe d’un Uruk Aï, un dragon est décapité, les flèches s’empalent dans les corps, des doigts sont coupés par une épée. Naturellement, Jackson ne détourne pas le regard de la violence, il la montre, sans pour autant s’en délecter. Elle est là, dans l’image, dans la mise en scène, dans l’écriture. Elle est brutale et soudaine, jamais contemplative, très souvent jouissive et libératrice.

Braindead est un film de zombies, une comédie horrifique-gore un peu kitch, qui avait des allures parfois de série Z où tout prend sens au moment donné. Parfaitement maîtrisé par son réalisateur, ce film à tout petit budget paraît être un blockbuster. Le kitsch du début nous ramène à l’innocence des personnages. Au fur et à mesure qu’ils traversent les épreuves, l’effet série Z disparaît au profit d’une bonne série B à voir entre amis. Braindead est un bon cru qui continue de se savourer aujourd’hui. Un film comme on en a rarement fait et dont on ressort avec le sourire et l’envie de se laver de tout ce sang qui a coulé devant nous.




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