
En Boucle, réutilise un concept apprécié : celui de la boucle temporelle, emprisonnant ses personnages dans ce fragment sans fin nous ramenant toujours à son point de départ.
Avant le film de Junta Yamaguchi, d’autres métrages ont mis en scène ce procédé ludique. En effet, Repeat Performance (1947) de Alfred L. Werker est le premier métrage à utiliser le retour en arrière temporelle, avant d’être popularisé en 1993 dans Un Jour sans fin de Harold Ramis. Depuis, le cinéma au petit budget s’est emparé du concept avec le film d’horreur Happy Birthdead (2017), ou Palm Springs (2020), à savoir que même les blockbusters se prêtent à l’exercice avec Edge of Tomorrow (2014) de Doug Liman avec Tom Cruise.
En Boucle n’aura, comme l’ensemble de ses prédécesseurs, nul besoin d’un budget fourni par la Warner. Le concept va imposer des restrictions au récit, le rendant divertissant, que ce soit au niveau du temps avec ces boucles de 2 minutes, ou l’espace, ne permettant pas aux personnages de s’aventurer trop loin de Kibune, en raison du temps qu’ils auront à leurs dispositions.
Ce sera alors dans une forme comique, burlesque voir théâtrale que Junta Yamaguchi nous immergera dans son espace confiné.

UNE MISE EN SCÈNE QUI FAIT SENS
Pour mettre en lumière la mise en scène de Yamaguchi, ce dernier va utiliser de nombreux plans-séquences. Un pour chaque boucle. Cet outil va être impressionnant techniquement, mais il va aussi et surtout permettre de donner un sens à la mécanique des boucles temporelles accompagnant Mikoto (Riko Fujitani) du début à la fin de chaque essais, avant de recommencer, à nouveau, en attendant de trouver une solution. Le plan-séquence va permettre de rendre le temps réel en nous immergeant à l’intérieur des 2m, de sortes à ressentir le temps véritable, tous comme les personnages. A contrario, si les coupures se seraient invitées au montage, la sensation de temps serait moins précise (comme l’utilisation de l’ellipse, par exemple). Ici, le temps est réel, il ne nous trompe pas. L’utilisation de ce plan va même se permettre quelque effet, comme ce travelling circulaire, épousant la forme d’une horloge, enfermant les personnages, cloisonnés dans le temps, emprisonnés dans cette boucle…
IMPACT SUR NOS RYTHMES
Mikoto ne sera pas seulement celle qui aura monté le plus d’escaliers, car elle sera surtout celle avec qui on évoluera à travers ces multiples cycles. Cela nous permettra de découvrir les autres personnages secondaires et tertiaires, majoritairement issus de l’hôtel de Kibune. Leurs activités détente seront bouleversées entre ce duo mangeant toujours la même nourriture, ou leurs activités professionnelles, avec cet écrivain, qui est un personnage très intéressant, car il renvoie en quelque sorte à une victime d’un système capitaliste nourri par le travail. N’ayant plus d’inspiration, le phénomène sera pour lui une chance de fuir ses responsabilités pour pouvoir se reposer. Cependant, cette pause interminable, pour quelqu’un enfermé dans cette boucle du travail, aura pour effet de le rendre fou, en raison de l’ennui.
De plus l’ami de Mikoto, Taku (Yuki Torigoe) avec qui des projets de rencards sont envisagés, aura comme objectif professionnel d’aller en France, ce qui sera compliqué, étant donné la situation.
Pour ce futur, peut-être couple, cette boucle en devient amusante. En réalité, si on prend le bon côté des choses, les conséquences peuvent être modifiées lors de la prochaine boucle, ce qui fait donc relativiser les actes commis lors de la précédente timeline.

–Spoilers–
Mikoto serait à l’origine de tout ça. Ce serait elle qui aurait fait le vœu d’arrêter la rivière. Cependant, nous allons nous rendre compte, qu’elle n’est pas la seule à avoir désiré arrêter le temps, car les autres personnages, pour une raison ou une autre le souhaitait aussi.
De plus, ce n’est pas anodin, de faire évoluer un système cyclique, préservant l’instant présent, dans un espace peuplé de nature, d’eau, de neige, bordé par la forêt, car elle contraindra les personnages à se reposer, comme un lieu de ressource. Même si sur le papier l’idée est intéressante, ne plus avoir de passé ni de futur reste néanmoins effrayant, allant à l’encontre de l’une des essences de la vie.
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